Gallix François, Vanessa Guignery, Jean Viviès et Matthew
Graves, eds.. Récits de voyage et romans voyageurs. Aspects
de la littérature contemporaine de langue anglaise. Aix-en-Provence:
Presses Universitaires de Provence / collection "écritures
du voyage", 2006.
Table
of contents
Introduction:
des frontières mouvantes, par Vanessa GUIGNERY
Préludes
Le renouveau du récit de voyage : du New Journalism au New Travel
Writing, par Matthew GRAVES
Voyage au coeur du voyage : The Art of Travel (2002) d'Alain
de Botton, par Vanessa GUIGNERY
Étapes fondatrices de l'hybridité
Bitter Lemons (1957) de Lawrence Durrell : le patchwork et le
palimpseste, par Françoise DUPEYRON-LAFAY
The Songlines de Bruce Chatwin : du voyage philosophique à
l'ethnologie poétique, par Jan BORM
Chemins de traverse
Sur les pas de John Rebus à Edimbourg : pérégrinations
symboliques dans l'oeuvre de Ian Rankin, par Arnaud SCHMITT
Récits de voyage, révolutions scientifiques et mutations
lexicales, par Jean-Louis VIDALENC
Le chant de marins au sein de quelques récits de voyage et romans
voyageurs contemporains de langue anglaise, par Marlène JUNIUS
Variations génériques récentes
Stratégies de l'errance : le voyage baroque dans Nights at
the Circus d'Angela Carter, par Christian GUTLEBEN
Stranger on a Train de Jenny Diski entre récit de voyage
et roman, par Nicole TERRIEN
The Saddest Pleasure, A memoir by Moritz Thomsen : travel narrative
as ego trip, par Michèle HITA
L'écriture du voyage dans The Enigma of Arrival et Half
a Life de V.S. Naipaul, par Florence LABAUNE-DEMEULE
Fluctuations génériques et mystifications en tous genres
: l'étonnant périple de Star of the Sea de Joseph O'Connor,
par Catherine MARI
En route vers la Tasmanie
Inventer le voyage dans une langue d'emprunt : histoires de quête
et d'exil dans English Passengers de Matthew Kneale, par Catherine
PESSO-MIQUEL
English Passengers ou les raisons qui amènent un romancier
anglais à écrire sur la cruauté de l'Empire britannique,
par Matthew KNEALE
*
L’objectif de cet ouvrage est de s’intéresser au discours du voyage
dans les récits et romans contemporains de langue anglaise (Grande-Bretagne
et ex-pays du Commonwealth). Plutôt que de cloisonner le récit de voyage
dans une catégorie générique isolée, il nous a paru pertinent de nous
interroger sur la porosité du genre et sur les interactions éventuelles
entre récits de voyage et romans qui intègrent des voyages, que l’on
appellera par commodité « romans voyageurs ».
En 1977, lorsque Bruce Chatwin publie In Patagonia, il renoue avec le genre du
récit de voyage, quelque peu délaissé depuis les années 1930 (Peter
Fleming, Robert Byron, Graham Greene), et le renouvelle en y injectant
du romanesque, expérience qu’il mènera à son terme logique dix ans plus
tard avec son récit-roman hybride The
Songlines. Il n’est d’ailleurs pas fortuit de noter que Bruce Chatwin
lui-même rejetait l’étiquette d’écrivain de voyage et revendiquait celle
de romancier. Dans la lignée de Chatwin, plusieurs écrivains voyageurs,
parmi lesquels Redmond O’Hanlon,
Paul Theroux, Jonathan Raban, Patrick Leigh-Fermor ou encore
Colin Thubron, et dans les années 1990, William Dalrymple, Jason Elliot
et Simon Winchester, ont suivi ce chemin fertile. Ainsi, la renaissance
du récit de voyage s’inscrit dans une perspective de brouillage des
contours génériques et ontologiques, et de remise en cause d’un contenu
qui se prétendrait purement référentiel.
Parallèlement,
des romanciers contemporains tels que Salman Rushdie, Graham Swift,
Julian Barnes ou encore Michael Ondaatje intègrent le discours du voyage,
de l’errance ou de l’exil dans leurs romans et se jouent des frontières
et conventions génériques en un mouvement général de ré-enchantement
de la littérature et de ses codes. Très récemment, le romancier Alain
de Botton a même consacré un ouvrage hybride, The
Art of Travel (2002), à l’inscription du voyage dans la littérature.
Ces romans voyageurs, remarquables par leur sens aigu de l’espace, abordent
par le biais de la fiction des questions fréquemment développées dans
les récits de voyage (déplacements, migrations, découverte de terres
inconnues, errances…).
La
problématique de notre ouvrage s’articule donc autour de ces notions
d’écriture voyageuse, de chassé-croisé entre roman et récit de voyage,
et d’entrelacement du fictionnel et du référentiel. Nous examinons des
ouvrages contemporains de langue anglaise qui empruntent tant au récit
qu’au roman, et mettent en évidence la multiplicité des formes du discours
du voyage. Nous nous intéressons également aux entreprises de récritures
de récits de voyage plus anciens afin de mettre en évidence l’ancrage
historique du genre et les apports insolites des écrivains contemporains.